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Notre économie se tient

À la tête de la Banque de France Auvergne-Rhône-Alpes depuis mi-2022, Kathie Werquin-Wattebled constate la résilience de l’économie nationale, tout comme celle d’Auvergne-Rhône-Alpes. Les chiffres régionaux viennent en partie de ceux produits par les entreprises locales, en collaboration avec leurs experts-comptables, des partenaires « essentiels » selon la directrice de la Banque de France.

Comment se porte l’économie française ?

« Nous enchaînons les périodes où nous craignons une crise et finalement, les résultats ne sont pas si mauvais que cela. 2023 s’est déroulée à petite vitesse. 2024 se poursuit sur cette tendance à +0,8 % de croissance attendue. On ne peut pas parler de récession mais une croissance autour de +1,5 % serait plus confortable pour l’économie. Ce sont les projections pour 2025 et 2026. Le taux de chômage est stable à 7,5 % au
niveau national à fin 2023 et aux alentours de 7,8 % en pic en 2024, avec une nouvelle baisse pour les deux prochaines années. Malgré un contexte géopolitique complexe et des taux d’intérêt élevés en France comme en Europe et aux États-Unis, notre économie se tient.

Qu’en est-il de l’immobilier, un indicateur aux répercussions multiples ?

Les chiffres de production de crédits immobiliers restent décevants en mars 2024, conséquence directe de la faiblesse de la demande des ménages. En année glissante, la production de crédits à l’habitat est passée de 218 milliards d’euros en 2022 à 128 milliards en 2023 puis à 112 milliards à mi -2024. À la suite de l’annonce de la baisse des taux des banques centrales, les marchés ont anticipé et les établissements bancaires commencent à amorcer une baisse des taux des prêts immobiliers dont les effets devraient s’apprécier à l’été 2024. On sait que ce secteur de l’économie en impacte de nombreux autres. L’amorce de la baisse des taux relancera plusieurs marchés.

Auvergne-Rhône-Alpes est-il un territoire plus résilient ?

Aucune différence n’est notée entre les tendances nationales et celles de notre territoire, très représentatif de l’économie française. Les prix de
l’immobilier, à Lyon surtout, se sont calmés. Le marché régional est plutôt sain. Quant aux entreprises, les dépôts de bilan sont nombreux, 7 070 ont été recensés à fin mars 2024 sur une année glissante, principalement pour les petites entreprises et celles dont les cotations Banque de France sont les moins bonnes. Mais c’est un niveau identique et normal à celui d’avant-Covid. Là encore, le marché s’assainit, sans parler de crise. En parallèle, les créations d’entreprises sont nombreuses. Beaucoup de jeunes créent, pas uniquement en autoentrepreneurs, mais aussi par l’intermédiaire de SAS capitalisées.

Quels moyens la Banque de France déploie-t-elle pour accompagner les entreprises ?

La Banque de France propose deux dispositifs : les correspondants TPME et la médiation du crédit. Les premiers sont en lien avec les entreprises lors du recueil des informations financières pour la cotation. Nous connaissons bien leurs dirigeants qui, parfois, n’ont pas les réseaux pour bénéficier d’aides et d’accompagnement. Nos correspondants TPME leur ouvrent leur carnet d’adresses pour, par exemple, entrer en contact avec Bpifrance sur les sujets d’innovation. Le volet médiation du crédit intervient en complément, et en amont, des nombreux dispositifs efficaces mis
en place par les tribunaux de commerce pour accompagner au plus tôt les entreprises en difficulté. Notre rôle de médiateur s’exerce entre un dirigeant et son banquier pour trouver des solutions amiables en toute confidentialité et de façon gratuite. Nous avons cependant peu de dossiers
en Auvergne-Rhône-Alpes.

Quel est le rôle des experts-comptables dans vos missions auprès des entreprises ?

En Auvergne-Rhône-Alpes, la Banque de France cote 40 000 entreprises sur la base des bilans produits par ces professionnels. Souvent, les dirigeants viennent chez nous accompagnés de leur expert-comptable pour évoquer chiffres et informations financières nécessaires à la cotation. Nous parlons avec eux, de professionnel à professionnel. Nos contacts sont fréquents et cordiaux.

Quelle vision avez-vous du métier d’expert-comptable ?

Ils apportent un regard critique et alertent leurs clients sur les différentes évolutions comptables. Ils jouent un rôle déterminant et essentiel pour les entreprises par leur vision “tour de contrôle”. »