Nommé par le tribunal compétent dans l’affaire citée, l’expert-comptable de justice suit un processus bien rodé.
Il ne choisit pas ses affaires. Il est désigné par un juge mais il peut refuser. «S’il connaît les parties en présence, il ne peut pas prendre le dossier », précise Gildas Tollet, expert-comptable, commissaire aux comptes et expert judiciaire inscrit près la cour d’appel de Lyon. Une fois qu’il s’est déclaré indépendant des parties – et qu’il n’est donc pas en situation d’incompatibilité pour travailler sur une affaire en toute indépendance –, l’expert-comptable de justice les réunit avec leurs avocats, souvent dans son propre cabinet, afin que chacune s’exprime. En amont, il a pris connaissance du dossier de plaidoirie pour mener les débats de la façon la plus constructive et la plus apaisée possible. «La rencontre permet la phase du contradictoire, essentielle aux yeux de la justice. Je donne la parole à chacun et je dois aussi faire taire. Le volet psychologique est fort durant cette rencontre, car la déstabilisation fait partie intégrante du processus. » Le justiciable doit impérativement se sentir entendu. C’est aussi le moment pour l’expert-comptable de justice de comprendre les rouages de l’affaire. « Je travaille alors à la recherche de la vérité pour éclairer le tribunal, assure Gildas Tollet. Mon rapport est soumis aux deux parties et à leurs avocats. Une réunion contradictoire peut à nouveau être organisée afin que chacun puisse exprimer ses observations. Le rapport final en tient compte. Puis, en tant qu’expert-comptable de justice, je le remets au juge afin qu’il puisse trancher. » L’apport d’un expert, d’un «sachant indépendant des parties, de leurs conseillers, des magistrats et des assurances», dans toute affaire, contribue à sa résolution. «Lorsqu’un expert de justice est mandaté, les parties se mettent d’accord grâce à son rapport dans 80 % des cas », conclut-il.
Le principe du contradictoire
Le principe du contradictoire permet à chacune des parties de disposer de toutes les pièces d’un dossier, de pouvoir en discuter et d’émettre des observations afin de garantir le caractère équitable du procès. L’expert-comptable de justice est garant de ce principe pour toutes les affaires qui lui sont confiées.
Exemples d’affaires
– Une entreprise accuse une autre de concurrence déloyale, un expert-comptable de justice est désigné par le tribunal de commerce pour évaluer le préjudice.
– Des associés se disputent. L’un veut vendre ses parts, mais les autres ne sont pas d’accord sur leur valorisation. Le tribunal de commerce nomme un expert-comptable de justice pour déterminer combien valent réellement les parts de l’entreprise.
– Lors d’un accident de la route, l’une des victimes est un chef d’entreprise en activité. Ses enfants demandent la valorisation de la société au moment du décès. L’expert-comptable de justice nommé établit cette valorisation.
– Lors des attentats du Bataclan, une des victimes était un jeune dessinateur. Sa veuve a pensé qu’il avait le potentiel pour devenir célèbre. Un expert-comptable de justice a été nommé pour chiffrer cette hypothèse.
– L’expert-comptable de justice intervient dans le démantèlement d’arnaques financières.