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La réforme des diplômes d’expertise comptable

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Véritable opportunité ou fausse route ?

À l’initiative des ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur, la réforme des diplômes d’expertise verra le jour à la rentrée 2026. Cette révision touchera le DCG, le DSCG et le DEC afin de mieux répondre aux défis et évolutions du secteur. Jacques Maureau, ancien président de la commission Formation du Conseil national de l’Ordre et président du label Écoles de la profession Auvergne-Rhône-Alpes, s’épanche sur le sujet.

Qu’est-ce que la réforme des diplômes ?

« Lancée par le gouvernement, cette réforme vise à moderniser les filières de formation en mettant l’accent sur l’acquisition de compétences pratiques plutôt que sur la simple accumulation de connaissances. L’objectif est de renforcer l’employabilité et la professionnalisation
des diplômes. Pour y parvenir, une collaboration étroite entre enseignants et professionnels est essentielle afin de rendre nos filières plus dynamiques et attractives. Cette réforme représente une opportunité unique pour les experts-comptables de contribuer activement
à la formation des nouvelles générations, en réponse aux besoins des cabinets.


Comment cela se traduit-il concrètement ?

Cela passe par l’intégration de nouvelles matières telles que la comptabilité extra-financière (RSE, certification CSRD…) et la gestion des données (data). Ces domaines, qui sont au coeur de cette réforme, sont cruciaux pour les futurs professionnels et deviennent désormais des disciplines à part entière que les jeunes professionnels devront maîtriser.

Les programmes seront alors redéfinis ?

Absolument. La réforme implique la création de programmes cohérents et adaptés aux attentes des professionnels. Il ne s’agit pas simplement d’enseigner ces nouveaux sujets de manière théorique, mais de les aborder avec une vision pragmatique et professionnelle. Ce travail collaboratif entre enseignants et experts-comptables doit permettre de développer une formation pertinente, réaliste et qui répond parfaitement aux attentes des cabinets. Par ailleurs, il faut écouter les professeurs sur le plan pédagogique. Ils joueront un rôle clé dans l’élaboration de ces programmes. En revanche, ils devront se former en amont pour maîtriser ces nouvelles matières, ce qui nécessitera du temps et des efforts importants.

Comment s’intégreront ces nouvelles matières au programme existant ?

C’est là tout l’enjeu. Les étudiants en DCG et DSCG doivent suivre un nombre précis d’heures de formation pour obtenir les crédits nécessaires à leur diplôme. Or, ces cursus sont déjà au maximum des heures de cours enseignées. Il faudra donc repenser les autres matières, soit en les allégeant, soit en les remplaçant. Certains professionnels suggèrent de substituer les IFRS (comptabilité internationale) par les nouvelles matières, en justifiant que la majorité des cabinets ne pratiquent pas ces sujets. Selon moi, cette approche est trop simpliste. Ce sont tout de même des diplômes d’excellence. Il serait regrettable d’occulter des connaissances utiles dans certaines pratiques professionnelles. Un étudiant doit être préparé à travailler dans n’importe quelle structure. Cela étant dit, il est sûrement nécessaire de réévaluer le poids de chaque matière sans pour autant dévaloriser le niveau de compétences dans les disciplines traditionnelles.

Qu’en est-il du DEC ?

D’abord, si des options aux DEC sont envisagées, je serai contre. Tous les diplômés d’expertise comptable doivent être à un niveau de formation équivalent, quitte à se spécialiser par la suite. Je vois d’un mauvais œil un diplôme à la carte. Ensuite, la réforme devrait prévoir une révision des examens, avec pour projet de supprimer les deux épreuves écrites pour les remplacer par du contrôle continu durant les années de stage. Selon
moi, c’est une mauvaise idée. Cette approche est difficile à mesurer et à mettre en œuvre. L’expérience des années Covid a démontré que cela causait de grandes disparités entre les candidats. À la place, il serait plus judicieux de redéfinir les années de stage et les sujets des examens qui sont absurdes, piégeux et souvent trop éloignés de la pratique réelle d’un expert-comptable en cabinet. Nous devons revenir à une approche plus
raisonnable pour faire évoluer notre formation et la rendre plus attrayante. »