« Être utile à notre profession »

Réélu président du Conseil régional de l’Ordre des experts-comptables d’Auvergne-Rhône-Alpes le 3 décembre 2024, Damien Cartel s’est entouré d’une équipe engagée au service de la profession et des confrères. La facturation électronique, la durabilité, l’attractivité de la profession ou encore l’interprofessionnalité seront déployées au plus près des territoires.

Dans quel contexte économique venez-vous d’être réélu ?

Damien Cartel : « Il y a 18 mois, nous avions prédit une situation complexe pour les entreprises et nous la constatons aujourd’hui à travers les chiffres des tribunaux de commerce. La crise de l’immobilier, le manque de logements, les politiques monétaires et gouvernementales font place à une cascade de difficultés pour les entreprises. L’économie artisanale et commerciale, dans les hypercentres comme Lyon, souffre également. Nous constatons un accroissement important du nombre de procédures collectives et surtout de la taille significative des entreprises concernées avec des destructions d’emplois importantes.

Dans ce contexte d’incertitude économique, quel est le rôle des experts-comptables ?

L’expert-comptable est aux côtés des chefs d’entreprise pour détecter les difficultés le plus en amont possible, leur faire prendre conscience, pour certains, qu’il faut sortir du déni et agir. Nous devons tout faire pour préserver la santé des entreprises par la prévention, en les orientant au plus tôt vers des procédures amiables ou collectives, en négociant avec leurs partenaires pour préserver les emplois. Les cabinets sont aux côtés des dirigeants mais aussi des pouvoirs publics locaux, au quotidien, pour trouver des solutions de retournement. La comptabilité est un outil indispensable pour “redresser la barre”.

Pourquoi la proximité, une priorité de la mandature précédente, est-elle à nouveau portée par votre équipe ?

Dans une grande région comme la nôtre, la territorialité est essentielle. Douze représentants départementaux implantés, impliqués et reconnus par leurs pairs entretiennent des contacts directs avec les acteurs locaux. Durant les quatre prochaines années, nous souhaitons renforcer les liens avec les associations locales d’experts-comptables pour mutualiser et valoriser nos initiatives réciproques. L’information se diffuse plus rapidement et l’impact est décuplé quand un président d’association, un représentant départemental et le président de l’Ordre régional parlent d’une même voix. Pour cela, outre le siège historique de l’Ordre à Lyon et notre antenne de Clermont-Ferrand, maintenue depuis la fusion, nous allons créer des “habitudes de lieux” dans chaque département pour nos réunions, nos formations, nos conférences.

Comment entendez-vous poursuivre le travail avec les tribunaux de commerce, les CCI, les partenaires économiques publics, etc. ?

Des chartes et des conventions existent déjà. Il faut donc continuer de les faire vivre et démontrer que les experts-comptables jouent un rôle de hub essentiel pour aider les entreprises, tant dans l’optimisation de leur performance que lorsqu’elles sont en difficulté. Nous favorisons la fluidité des relations et de la diffusion de l’information avec les mandataires, les administrateurs judiciaires et tous les acteurs de la procédure. Quelques tribunaux de commerce sont encore à visiter mais ils sont convaincus de l’intérêt de cette collaboration. Nous serons bien accueillis. De plus, l’interprofessionnalité, travaillée depuis plusieurs mandatures, est désormais bien installée. Elle est à entretenir et à faire prospérer pour maintenir une bonne synergie entre nos métiers complémentaires.

Quelles sont les grandes priorités de votre mandat ?

La priorité numéro 1, c’est la facturation électronique. Auvergne-Rhône-Alpes est en avance sur le sujet : sur la formation des experts-comptables – ce sont les plus formés de France – et sur l’outil. L’Ordre s’est engagé à fournir un outil très compétitif tant sur le coût que sur les fonctionnalités, pour gérer les flux de facturation en cabinet. La seconde phase dans laquelle nous sommes, c’est l’information auprès des clients des cabinets. Mais les experts-comptables sont prêts à accueillir la facturation électronique pour leurs clients. Autre axe majeur : la cybersécurité. Demain, un confrère cyberattaqué disposera d’un numéro vert mis en place par l’Ordre pour agir vite et mobiliser les bonnes ressources. Le dispositif est en cours de création au sein de l’Ordre Auvergne-Rhône-Alpes. Troisième volet de la mandature, la durabilité, un sujet déjà travaillé pendant les années précédentes. Nous discutons avec des partenaires, comme les commissaires aux comptes, pour définir des éléments de langage communs et accessibles aux TPE et PME. Les plus grandes entreprises doivent produire des rapports de durabilité qui, par ruissellement, touchent toutes les entreprises. Les experts-comptables sont au service de ces petites entreprises pour dispenser l’information, sans ajouter plus de complication à la lourdeur administrative.

Lors de votre précédente mandature, vous aviez un engagement fort auprès des étudiants. Poursuivez-vous cet axe ?

Bien sûr ! Plus que jamais, nous allons amplifier le label École de la profession qui est un réel succès auprès des établissements publics, privés et du rectorat. Nous avons pour cela, en interne, notamment avec Jacques Maureau, président de la commission formation, une équipe motivée pour remporter tous les défis de l’attractivité et de la fidélisation. Malgré l’impact de la récession économique actuelle, même si les cabinets restent prudents dans leurs recrutements, 1 000 postes sont à pourvoir en permanence en Auvergne-Rhône-Alpes.

Où en sont les cabinets en matière de digitalisation et de transformation des métiers ?

Sans aucun débat, nous sommes la profession la plus digitalisée de France. Désormais, les cabinets prodiguent davantage de conseil et d’accompagnement pour les entreprises. Ce nouveau positionnement impacte le management des collaborateurs des cabinets. Pour cela, le Club management-RH, piloté par Jérémy Renchy, donne des clés pour faire évoluer la culture d’entreprise. Et puis l’intelligence artificielle, finalement présente dans nos cabinets depuis près de 20 ans sous le terme d’automatisation, va nous permettre de collecter des données encore plus rapidement et de piloter grâce à elles. Nos métiers mutent vers de l’analyse plutôt que de la gestion de flux classique.

Qu’aimeriez-vous que vos confrères retiennent de votre mandature ?

Qu’avec les membres de mon équipe, nous avons été utiles à la profession et donc à nos confrères, par notre engagement et nos actions, sur des sujets tous aussi importants les uns que les autres, que ce soient la facturation électronique, la cybersécurité ou la proximité… Que nous les avons accompagnés dans l’évolution de leurs missions et de leurs cabinets. Enfin, que les experts-comptables n’oublient pas qu’ils appartiennent à une profession réglementée, que c’est une chance et un atout majeur dont ils doivent être fiers et dignes. Nous avons été élus pour tout cela et nous nous y emploierons à chaque instant. »